Gabriel, abbé, secrétaire de Fénelon

Louis-Joseph, frère de Jean l’archiprêtre, a 3 garçons qui arrivent à l’âge adulte. L’aîné est officier et meurt au combat sans descendance.

Gabriel de La Cropte de Chantérac, le troisième, a son oncle Jean pour parrain. Il est destiné à l’Eglise.  Il grandit paisiblement en Dordogne avant de rejoindre le séminaire Saint-Sulpice à Paris ou il entre le 14 juillet 1662.

Dans cette solide institution, il apprend la vie d’oraison et l’esprit de sacrifice. Il s’agit de « ne rien désirer par soi, mais seulement en Jésus-Christ qui fait désirer les choses quand il faut et comme il faut » et de « vivre dans l’esprit de Jésus-Christ qui doit nous séparer du monde animés du monde même »

L’abbé de Chantérac, secrétaire de Fénelon qui était son cousin germain

François de Salignac de La Mothe-Fénelon dit Fénelon est un lointain cousin de Gabriel. Né le 6 août 1651 au château de Fénelon à Sainte-Mondane, à côté de Sarlat, il était le fils de Louise de La Cropte de Saint-Abre, seconde épouse de Pons de Salignac (1601-1663), marquis de La Mothe-Fénelon. Il vient étudier lui aussi au séminaire Saint-Sulpice, mais cinq ans plus tard. Lui et Gabriel ne s’y rencontrent pas.

La carrière ecclésiastique de Fénelon commence bien : il a les faveurs de Louis XIV qui le choisit en 1689 comme précepteur de son petit-fils le duc de Bourgogne. Il est nommé archevêque de Cambrai (1695-1715).

Mais les choses tournent mal pour lui :

Avec l’Eglise d’abord, car il adhère au quiétisme qui pose comme vertu la tranquillité de l’âme et sa proximité personnelle avec Dieu. Mais cette doctrine a déjà été condamnée en Italie en 1687 par le pape Innocent XI qui y voyait un mépris de l’autorité ecclésiastique et un risque de morale relâchée. Le débat reprend et oppose Fénelon et Bossuet.

Avec Louis XIV aussi, dont il perd le soutien en 1699 :

Dans son roman Les Aventures de Télémaque écrit pour l’éducation des petits-enfants du Roi, il a osé suggérer que le religieux pouvait aussi se mêler des affaires de la cité créant ainsi des « ponts » entre la terre et le ciel. Cette idée est considérée comme une critique inadmissible de l’absolutisme royal. Fénelon doit quitter la cour.

Le directeur du séminaire met Fénelon en relation avec Gabriel : « C’est un de nos plus intimes amis et qui est capable de vous rendre de grands services. Car je crois qu’il n’aura pas moins d’esprit de capacité, de prudence et de bonne volonté qu’il en avait autrefois au séminaire. »

Fénelon choisit Gabriel pour défendre le quiétisme à Rome et plaider sa cause auprès du pape Innocent XII.

Gabriel se donne corps et âme à cette cause où il fallait faire preuve d’érudition, d’abnégation et de fermeté.

Pour avancer, Gabriel, homme réfléchi mais discret et modeste, s’appuie sur cette phrase de Fénelon « L’homme digne d’être écouté est celui qui ne se sert de la parole que pour la pensée et de la pensée que pour la vérité et la vertu. »

Albert Delplanque dans sa notice « Fénelon et ses amis » écrit à ce sujet :

« Ses lettres écrites de Rome ne se détournent jamais de leur objet : la Rome chrétienne et la Rome païenne, tant de monuments grandioses de deux civilisations à côté desquels il passait tous les jours, le paysage, la beauté du ciel et des montagnes, les mœurs du pays, rien de tout cela n’a laissé de traces dans ses lettres et on regrette cette sobriété et cette sécheresse ; mais il n’écrit pas pour s’amuser, ni pour amuser ; il écrit parce qu’il le faut ».

C’est donc avec une farouche obstination mais avec modestie, que Gabriel défend la cause. Fénelon l’exhorte à se montrer plus offensif : « Elevez un peu votre voix, mon cher abbé, et songez que le voici le temps de l’élever pour faire une puissante impression sur les juges. » (Lettre du 25 avril 1698).

Dans ses lettres transparaît combien Gabriel appréciait la droiture de Fénelon, son souci d’être dans la vérité, son esprit évangélique, sa modestie et sa justesse.

L’estime est réciproque ; « Sage dans la conduite, ferme pour le dogme » C’est ainsi que Fénelon qualifie, lorsqu’il doit le présenter, celui qu’il appelle familièrement son parent. Dans l’intimité, il l’appelle « le Vénérable ».

Mais Gabriel rentrera de Rome sans avoir réussi à plaider la cause, fatigué, ne pouvant presque plus marcher. Il reprend sa mission de directeur spirituel auprès des carmélites de Bordeaux avant que Fénelon ne l’appelle à Cambrai pour être son vicaire général. Il y favorisera l’ouverture d’un séminaire.

Il restera jusqu’à la fin de sa vie un des plus proches collaborateurs de Fénelon, soumis et obéissant à l’église de Rome et toujours profondément soucieux du salut des âmes.

Fénelon meurt le 7 janvier 1715 à Cambrai. Gabriel meurt à Périgueux le 20 août de la même année.

Les trois générations suivantes de la famille Chantérac reprendront le prénom Gabriel.

Source :  Visages de Fénelon, Société d’émulation de Cambrai ‘tome 114,

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